PRECARités – une analyse pluridisciplinaire des engrenages de la PRECARisation au Liban (travail, mobilités, propriétés)
Le programme de recherche pluridisciplinaire PRÉCARités, soutenu par l’Agence nationale de la recherche française entre 2022 et 2024, se propose d’observer, documenter et analyser la crise multisectorielle que connait le Liban face à l’effondrement sans précédent du système bancaire, l’explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020 et la pandémie de la COVID 19.
Dans le prolongement de travaux portant sur la précarisation des sociétés modernes (Cingolani, 2015 ; Paugam, 2007 ; Beck, 2001), notamment des recherches menées à l’Université libanaise (Hanna, Ladwein, Naja et Mekdessi, 2017), il s’agit de mettre en lumière des processus – les précarisations – qui, dépassant ceux de la simple paupérisation de la société, accroissent des situations d’insécurité dans différents domaines d’existence (politique mais aussi matériel, sanitaire, économique). Ils entravent toute prévoyance et transforment durablement les rapports des individus à leur société. En ce sens, la précarisation est productrice d’insécurités, c’est-à-dire d’incertitudes sur l’avenir. Elle n’en est pas toujours le synonyme. Prenant le contrepied d’analyses répandues sur la société libanaise qui n’abordent sa « résilience » (ses capacités intrinsèques à réagir à des chocs successifs) qu’à l’aune de la stabilité de ses élites, en minimisant ses vulnérabilités polymorphes et en ignorant les puissantes formes d’exclusion sociale en jeu, nous faisons la proposition de centrer l’attention sur les interactions complexes entre protections et précarités. Autrement dit, nous aborderons la problématique des résiliences sous l’angle de ce qu’elles masquent
Comment comprendre de ce qui entrave la mobilisation et le développement de filets de sécurité face à la crise multisectorielle que connait le Liban? Comment la pandémie de la COVID 19 et l’explosion du port ont-elles accentué des inégalités, des incertitudes et des besoins de sécurité sociale ? Nous proposons d’étudier les mécanismes par lesquels les protections assurées par le travail, par la mobilité et les solidarités de proximité comme par la propriété génèrent indirectement et de façon combinatoire et exponentielle, des risques devenant exorbitants. Paradoxalement ces protections engendrent des processus variés de précarisation, tant en matière de marchandisation des protections que de solidarités rapprochées, deux piliers des modèles de développement néolibéraux. En ce sens, la crise actuelle révèle des processus plus structurels sur lesquels agir, qui ont pu être masqués par d’autres formes de résiliences.
Trois arènes de précarisation sont mises en exergue, qui concentrent l’essentiel de nos enquêtes : les mondes du travail, les dynamiques de mobilité et les formes de la propriété.
Responsables : Myriam Catusse, Ifpo. m.catusse@ifporient.org / Nizar Hariri USJ, nizar.hariri@usj.edu.lb /
Cycle de séminaires organisés dans le cadre du programme : https://www.ifporient.org/precarites/