Découverte archéologique de la Mission Archéologique du Sud-Est Jordanien
La Mission Archéologique du Sud-Est Jordanien (MASEJ), un programme scientifique franco-jordanien co-dirigé par W. Abu-Azizeh (Responsable de l’antenne de l’Institut français du Proche-Orient dans les territoires palestiniens) et M. Tarawneh (Al-Hussein Bin Talal University, AHU) a fait une découverte majeure au cours de sa dernière campagne de terrain. Celle-ci a été présentée publiquement lors d’une conférence de presse organisée en sa présence par le Département des Antiquités de Jordanie et le Ministère du Tourisme et des Antiquités jordanien, le 22 février 2022. L’annonce de ces découvertes a un retentissement international relayé par de nombreux médias. La MASEJ, soutenue par la Commission consultative des recherches archéologiques à l’étranger du MEAE, le CNRS et l’Université AHU, vient de se voir décerner la distinction du label de la prestigieuse Académie des Inscriptions et Belles-Lettres pour les années 2022-2023.
La MASEJ s’intéresse au développement de l’occupation humaine dans les marges désertiques du Proche-Orient au cours de la Préhistoire récente (du Néolithique à la fin de la période du Bronze ancien). Au cours des dernières années, ses travaux ont porté sur l’étude de structures spectaculaires de pièges de chasse de masse à la gazelle, connus sous le nom de « Desert kites ». Les premières attestations de ces méga-structures, pouvant atteindre plusieurs kilomètres de longueur dans un secteur reculé du désert du sud-est jordanien, sont datées du Néolithique (env. 7000 av. J.-C.). Il s’agit par conséquent des structures construites à grande échelle les plus anciennes connues à l’heure actuelle au monde. Mais l’aspect le plus significatif des fouilles de la MASEJ est certainement la découverte, pour la première fois au Proche-Orient, d’une occupation directement associée aux populations de chasseurs utilisant ces structures de piégeage. Ceci fournit des informations inestimables sur l’organisation socio-économique et le contexte technoculturel de ces groupes humains, avec l’identification d’un nouveau façiès chrono-culturel jusqu’ici inconnu au Proche-Orient, désigné sous le nom de « culture Ghassanienne ». Ces recherches ont culminé avec la mise à jour au cours de la dernière campagne d’une structure rituelle unique par son état de préservation et par son organisation. Elle constitue un témoignage sans précédent d’un aménagement rituel complexe, empreint d’une symbolique profonde en référence à la chasse de masse et à l’utilisation des « Desert kites ». Ceci jette une lumière entièrement nouvelle sur le symbolisme, l’expression artistique et la culture spirituelle de ces populations néolithiques.
Les travaux de la MASEJ sont intégrés dans les axes de recherche de l’Ifpo portant sur la formation des sociétés anciennes. Ils bénéficientdu soutien de diverses institutions françaises, jordaniennes et internationales, notamment au travers de l’Appel d’Offre Jordanie, programme annuel de coopération bilatérale entre le CNRS et la Direction des Antiquités jordaniennes. De même, un accord-cadre de coopération scientifique et interuniversitaire a été établi en 2016 entre le laboratoire Archéorient – UMR 5133 et le Nabataean Center for Archaeological Studies et leurs tutelles respectives, le CNRS et l’Université de Lyon 2 d’une part, et l’Université Al-Hussein Bin Talal d’autre part. La MASEJ s’investit dans la formation d’étudiants des établissements supérieurs français et jordaniens, et elle compte parmi ces membres plusieurs jeunes chercheurs post-doctorants dans diverses disciplines. Elle joue un rôle moteur dans la formation universitaire et la dynamique de développement de ces projets postdoctoraux. Enfin, la MASEJ dispose du soutien du SCAC et de l’Ambassade de France en Jordanie pour la valorisation de ses résultats, notamment par le financement d’une salle d’exposition en cours de préparation dans les locaux de la faculté d’archéologie de l’AHU à Wadi Moussa/Pétra.