Habitat et évolution socio-culturelle des villes du Proche-Orient
Par sa précocité et son ampleur, la naissance du phénomène urbain constitue un des thèmes privilégiés de l’histoire urbaine au Proche-Orient (B. Chiti). L’arrivée des Grecs d’abord, puis dans une moindre mesure des Romains, a eu des conséquences majeures sur le réseau urbain de la fin de l’âge du Fer en particulier par la création de villes nouvelles protégées par de puissantes fortifications (M. Gelin, S. Al Sbib). Les villes ont été profondément, parfois même radicalement, transformées à l’époque romaine. Et ces transformations rendent compte d’une évolution socio-politique complexe comme on peut l’inférer d’un ensemble aussi bien conservé que Gérasa de la Décapole qui permet entre autre d’étudier un foyer d’hellénisation en milieu sémitique puis ses transformations successives sous l’autorité de Rome (J. Seigne).
À la fin de l’antiquité, la ville classique présente un paysage urbain métamorphosé qui traduit à sa manière des rapports socio-économiques presque médiévaux (P. Piraud-Fournet, J. Seigne). Ce sont ces grandes étapes qui structurent le programme consacré à la ville du DAHA.
L’urbanisme et l’architecture comme éléments pour la connaissance des sociétés anciennes : le cas de la Syrie à l’Age du Bronze (IIIe-IIe millénaire av. J.-C.)
Responsable : B. Chiti
Description : Dans le domaine de l’archéologie proche-orientale, une compréhension globale et approfondie du chemin, ou des chemins, qui ont conduit à l’émergence de la ville, ainsi que de l’État, demeure encore aujourd’hui un objectif inachevé. C’est pourquoi, la définition des étapes qui ont déterminé la formation des sociétés urbaines complexes — et ensuite leur développement — reste l’un des thèmes les plus importants et plus intéressants parmi les recherches concernant le Proche-Orient ancien.
Bien que ce processus de transformation soit documenté dans toute la région proche-orientale, les rythmes, les choix et les solutions qui ont amené au changement semblent se modifier selon le milieu géographique et culturel. En ce qui concerne la Syrie, cette transformation semble débuter à partir du IIIe millénaire, quand un important développement économique, social et culturel est documenté. Ces changements constituent les fondements du processus évolutif qui témoigne de l’émergence d’une plus grande complexité des implantations villageoises, de la naissance des villes et enfin de l’apparition de l’État.
Ce programme propose d’analyser cette « transformation » selon une double perspective, à la fois urbaine et architecturale. La première, plus générale, est centrée sur l’examen des caractéristiques des agglomérations, leur nature, leur organisation et vise à la définition de leur degré de développement (village, ville, capitale régionale, etc.) ainsi que de leur rôle dans le système d’occupation du territoire. La deuxième, plus ponctuelle, porte sur l’étude architecturale des vestiges détectés et en particulier sur l’habitat, l’un des éléments le plus directement concerné par ce type de transformation. En effet, la maison est un marqueur culturel primaire dans la définition de la société au sein de laquelle elle a été conçue, du fait qu’elle est le résultat d’un projet architectonique, tributaire de contraintes et de choix opérés par ses habitants. Elle correspond également à l’organisation d’un espace anthropique délimité, et plus encore, à un lieu social, culturel et idéologique. Ainsi, l’étude combinée du milieu villageois/urbain et des productions architecturales constitue un élément essentiel pour la reconstitution d’une image cohérente des sociétés habitant la Syrie à l’âge du Bronze et des dynamiques de leur développement.
Fondations, fortifications et transformations des villes hellénistiques
Responsables : M. Gelin, S. Al Shbib (DGAMS, archéologue, doctorant à l’Université Paris 1)
Les sites de Cyrrhus (Syrie) et Faïlaka (Koweït) constituent actuellement le cadre principal de ce thème de recherche.
Transformations du paysage urbain à la fin de l’Antiquité
Responsables : P. Piraud-Fournet, J. Seigne
À la fin de l’Antiquité, les villes du Proche-Orient connaissent de profondes transformations dont témoignent l’insertion de monuments singuliers – caractéristiques de l’évolution socio-culturelle –, de profondes modifications de la voirie, et l’apparition d’un nouveau paysage urbain marqué par l’usage systématique des matériaux spoliés provenant des grands bâtiments, civils ou religieux, abandonnés (J. Seigne). Les villes, désormais remparées, font une large place aux monuments du culte chrétien (églises, monastères, palais épiscopaux) ; l’habitat connaît aussi des aménagements singuliers liés à la vie quotidienne des notables, civils ou ecclésiastiques. L’inventaire et l’étude des salles de réception de forme triconque et des petits ensembles thermaux du Proche-Orient devraient apporter une contribution renouvelée à notre connaissance de l’habitat urbain tardif (P. Piraud-Fournet).
Recherche sur l’architecture nabatéenne
Responsable : A. Hamm
L’étude du système décoratif architectural nabatéen conduit à s’intéresser aux constructions appareillées (ou monuments libres) mais également à la taille rupestre. Or il s’agit là de deux manières complètement différentes d’aborder le travail de la pierre : le premier champ appartient au registre de l’architecture tandis que le second pôle concerne d’avantage celui de la sculpture. Ce postulat a pour conséquence des modifications dans l’ornementation stylistique du monument. Il s’agit dès lors de tenter de quantifier dans quelle mesure le poids de la technique influe sur les différences de design entre ces deux pôles. Par ailleurs et à des degrés différents, l’ensemble du décor architectural et rupestre de la Nabatène est fortement marqué par l’empreinte alexandrine, voir ptolémaïque. Le lien non seulement commercial mais également culturel entre les deux royaumes a en effet pu être démontré en de multiples occasions. Il serait pourtant réducteur de considérer la capitale et le royaume lagide comme la source et/ou le vecteur de l’ensemble du langage stylistique de la fin de la période hellénistique et du début de l’empire. De fait, il s’agit d’une période importante et florissante de l’histoire de l’architecture. Dans la région notamment les élites sont particulièrement productives et leurs réalisations architecturales doivent être interprétées comme la traduction pétrifiée de leur pouvoir et de leur culture bien souvent philhellène. L’habillage ornemental des réalisations nabatéennes fait ainsi écho à celui des régions voisines. La Nabatène et Pétra, sa capitale, est en effet à ce moment-là une plate-forme caravanière importante. Il est facile dès lors d’imaginer ces artistes/artisans itinérants faisant une halte dans le royaume contribuant ainsi à la circulation des idées et des modes. L’étude du système décoratif nabatéen ouvre ainsi une fenêtre sur cette période d’échange dans le Proche-Orient. En effet, les Nabatéens se sont s’imprégnés de l’architecture classique et de ses évolutions hellénistiques. Cette appropriation a eu pour conséquence la création d’un langage architectural unique dont les réalisations sont visibles en Jordanie bien sûr mais également en Arabie Saoudite, en Syrie et dans la région du Néguev.
Urbanisme et architecture à Gérasa de la Décapole
Responsable : J. Seigne