Combattre par la plume, le prêche et l’épée. Les représentations du rôle des ulémas dans l’effort du jihad mamlouk, par Mehdi BERRIAH

Si la participation des ulémas et des hommes de religion aux affaires de la guerre est un phénomène assez connu dans l’Islam médiéval de manière générale, on peut constater qu’il l’est moins pour l’époque mamlouke bahrite, en particulier en ce qui concerne le rôle et la participation militaire des ulémas aux côtés de l’armée. Constat paradoxal lorsqu’on sait que l’époque est celle d’une revivification de l’esprit du jihad avec les exploits militaires des Mamlouks remportés sur les Mongols, les Francs et les Arméniens. En outre, les auteurs d’époque apportent bon nombre d’informations sur le sujet. Ils relatent en effet la présence d’hommes de religion et d’ascètes accompagnant l’armée mamlouke dans ses campagnes et décrivent, de manière plus ou moins détaillée, leur rôle et leur implication. Ce dernier constat soulève plusieurs questions : dans quel rôle les ulémas et les hommes de religion sont-ils présentés comme des contributeurs à l’effort du jihad des Mamlouks dans les sources ? Si leur rôle de propagandiste, de soutien psychologique et d’accompagnateur idéologique des élites politiques et militaires semble évident, comment est-il décrit par les auteurs ? Qu’en est-il de leur rôle proprement militaire sur les champs de bataille ? Est-il symbolique ? Participent-ils au combat ? Si oui, de quelle manière et comment cette participation guerrière est-elle présentée ? Représentent-ils et sont-ils présentés comme une aide et un apport substantiels pour les Mamlouks ? Enfin, quelle fut la perception, par l’élite mamlouke, de la participation de ces hommes de religion dans les affaires du jihad ? À partir de l’analyse et de la confrontation des sources arabes mamloukes, cet article tente donc de faire la lumière sur la représentation, par les auteurs d’époque mamlouke, du rôle et de la participation des ulémas et des hommes de religion dans l’effort du jihad de la moitié du viie/xiiie au début du viiie/xive siècles.